Actualité • 9 janvier 2025
A l’occasion de l’évènement organisé par Icade sur la ville de 2050 et de ses enjeux, Marc-André Selosse est intervenu sur la table-ronde « Bâtir la ville de demain : l'équation délicate des ressources limitées ». Il s’est ensuite prêté au jeu des questions-réponses sur cette thématique.
Elle est floue, mais elle est imprégnée de plusieurs perspectives vraiment importantes. La première, c'est un retour de la nature dans cette ville. C'est une intrication plus grande de la nature, ce n'est pas juste du vert. Ce sont aussi les fonctions de la nature : refroidir, produire de l'alimentation, absorber l'eau, la renvoyer, en évitant des inondations par exemple. Et c'est aussi du coup, un sol qui est disponible car, en fait, on l'omet trop souvent, il n’est pas de végétation sans sol et on a besoin de rétablir un sol vivant, un sol ouvert aux précipitations, un sol qui stocke du carbone, un stock qui nourrit la végétation.
C'est un impératif absolu, on artificialise aujourd'hui 3,7 fois plus vite que la démographie n'augmente. Et ce besoin gourmand de sols, il nous a privés depuis 1970 de 10 % de la surface agricole utile et sans doute les meilleures terres qui se trouvaient à proximité des villes. Or la productivité va baisser à cause du changement climatique, or on veut aujourd'hui des agricultures alternatives qui utilisent moins de pesticides, donc dont le rendement risque de baisser un peu. On a besoin de place, d'autant plus que l'énergie aujourd'hui vient s'ajouter aux fonctions des sols, pensez à l'agrophotovoltaïsme, pensez à la biomasse pour la méthanisation, on a vraiment besoin de sols, il faut arrêter cette gourmandise de sols et re-développer les centres-villes.
Plus de nature en ville, c'est penser à la nature indigène ou alors aux plantes qu'on a dans des zones plus au sud qui ont aujourd'hui le climat que nous aurons demain. Donc une nature adaptée au changement climatique. C'est, on le disait, remettre des sols en dessous car il faut des sols pour nourrir les plantes et pour absorber l'eau qu'elles boiront à leur tour. Je pense aussi à une nature productrice d'aliments et il n'est pas aberrant que ce soit un apport, ce ne sera jamais un remplacement de la culture hors ville bien sûr, mais un apport nutritif. Et je pense surtout à complètement disrompre cette idée que la société est dans un coin, la nature dans un autre. La ville, c'est un endroit où montrer que les deux peuvent être complémentaires pour plus de services à l'Homme.
On dit que 60 % des sols français ne vont pas bien, entre l'érosion, la pollution par des pesticides, là, c'est presque 90 % d'entre eux qui en contiennent. Mais nos sols, en fait l'agriculture, ne les tuent pas et en changeant de méthodes agricoles, on peut très facilement régénérer un sol, notamment par l'agriculture de conservation. Non, ce qui tue vraiment les sols, c'est l'artificialisation, car là, il n'y a plus d'apport d'eau, il n'y a plus d'apport de matières organiques puisqu'il n'y a plus de végétation au-dessus, il n'y a plus de respiration car le sol est damé. Et je pense qu'effectivement ce qui tue les sols, c'est l'artificialisation, alors même qu'on peut imaginer une ville qui gère des sols.